(HRP: bon, comme ça faisait assez longtemps, je me suis un peu laché ^^)
(…) fut surpris de se la voir accordée aussi tôt que sa requête fut faite. Il se serait attendu à devoir au moins apposer son seau sur un document officiel, voir même à subir une quelconque forme de pression de la part de la guilde des médecins, forts capables lorsqu’il s’agit de défendre leurs privilèges à la cours. Mais contre toute attente les portes de la citadelle s’ouvrirent devant lui.
Légèrement troublé par l’aura dégagée par ce lieu historique, il pénétra dans la pénombre des vieilles pierres. L’intérieur de la bâtisse, bien que singulièrement dénué de décorations superflues, pourtant d’usages dans les demeures des personnes de haut rang, ne l’en laissa pas moins bouche-bée. C’est qu’il se trouvait pour la première fois devant l’un dès principaux artefact de l’Empire : l’Hélice de Vie.
Son origine se perdait dans le temps. Certains disaient que la Citadelle Impériale avait été construite autour d’elle. D’autres prétendaient que l’Hélice avait poussé du sol alors même que la Citadelle était achevée. Mais c’est moins les origines étranges de cette structure faite de lave et d’eau que son halo rougeâtre dansant sur les murs qui mit Chad en émois.
Il avait l’habitude de cette couleur pourtant. Combien de fois n’avait-il pas emprunté le portail du Nether pour aller en quêtes des ingrédients pour ses concoctions. Mais ici c’était différent : le Nether était là, devant lui, enfermé dans une immense tubulure en verre, se chamaillant de beauté avec l’eau qui l’enlaçait. Akatéa,se battant avec…mais avec quoi, d’ailleurs. Qu’était le Nether ? Et pourquoi leurs représentations à tous deux se trouvaient ici, à Mont-Brumeux ?
Aurait-il voulu répondre à ces question qu’une vie entière de recherches n’aurait peut-être pas suffit. De toute façon, une jeune femme en habits traditionnel arriva, coupant court à ses réflexions.
« -Son Eminence vous attend. », dit-elle d’un ton neutre. « Veuillez me suivre. »
Elle tourna machinalement les talons et se dirigea vers l’escalier menant au second étage. Ses pas étaient presqu’imperceptibles sous sa longue robe bleue, rendant sa démarche quelque peu fantomatique. Chad la suivit.
Arrivé à l’étage de la Salle du Conseil, l’apothicaire fut une nouvelle fois surpris. Car plutôt que de lui demander de patienter sur un banc le temps que Sa Magesté vienne le rejoindre, la jeune femme, de toute évidence une gouvernante, l’enjoignis de la suivre… par la porte de l’escalier en colimaçon donnant sur le troisième étage, l’étage des appartements impériaux !
Chad n’arrivait pas à le croire ! Non seulement on lui avait ouvert les portes de la Citadelle comme s’il avait été un personnage d’importance, mais maintenant on le faisait pénétrer dans la partie du bâtiment sans doute la plus sécurisée et la moins fréquentée, même par le haut gratin de l’Empire !
Se pouvait-il qu’on l’ait pris pour un autre ?! Que le Grand Intendant gravisse cet escalier était concevable, mais pas Chad, pas un akatéen qui, bien que connu à Rive-Feuille, devait encore se faire un nom auprès de l’Empereur !
Telles étaient les pensées confuses de l’apothicaire lorsque, ayant gravis la moitié de l’escalier…il se retrouva en train de le descendre ! Non pas qu’il avait fait demi tour, non ! L’instant d’avant il le montait, et là, soudain, il le descendait ! Interloqué, il s’arrêta. Il n’était pas le seul à subir ce « phénomène étrange » : la gouvernante, jusqu’alors le précédent quelques marches en aplomb…se tenait maintenait plus bas que lui, et descendait elle aussi les marches !
« - Dame Mariella ? », lança-t-il en direction de la jeune femme.
Cette dernière s’arrêta et se retourna. Extrêmement belle, son regard n’en était pas moins vide d’émotion. Elle ne dit mot, mais interrogea de ses beaux yeux bruns le jeune homme.
« -Je… nous… enfin nous… », bégaya-t-il, se tournant et se retournant, montrant le haut des escaliers du doigt.
La jeune dame esquissa un sourire (ce qui là rendit encore plus belle !) :
« - Vous avez rencontré l’Empereur », dit-elle comme si cela était la plus naturelle chose en ce monde.
« - Je…non ! Je –dois– rencontrer l’Empereur ! », martela Chad.
La gouvernante souri t de plus belle. De toute évidence, cette situation l’amusait.
« - Vous m’avez appelé par mon nom, n’est-il pas ? », demanda-t-elle.
« - De fait, mais en quoi… »
« - Vous rappelez-vous que je vous aie dit mon nom ? », l’interrompit-elle avec douceur.
Le jeune apothicaire écarquilla les yeux. Il allait décidément de surprises en surprises. Non, en effet, elle ne lui avait jamais dit son nom ! Et pourtant…pourtant, il –connaissait– son nom.
« -D’ici quelques instants », poursuivit-elle, « vous vous rappellerez de bien d’autres choses… »
Sur quoi elle se remit à descendre les marches comme un ruisseau descend son lit. Chad ne su quoi rajouter, et bien que ne sachant plus vraiment s’il était en train de rêver ou pas, il se remit à suivre la gouvernante.
« Dame Mariella », pensa-t-il. « Pourquoi diable connais-je son nom ? »
Lorsqu’ils attinrent le deuxième étage, les pensées décousues de Chad furent interrompues par une douce et chaude clarté venant des fenêtres du couloir : Cycléis, proche du couché, baignait la Citadelle par de longs rayons rasants l’horison.
« Déjà le crépuscule ?! », s’étonna Chad. « J’aurais juré qu’il n’était à peine qu’une heure après le midi ! Je…»
Le jeune homme s’arrêta de nouveau, mais cette fois en sueur. Il regardait par terre, la mine défaite, comme si un grand poids venait de s’abattre sur ses épaules. Et, d’une certaine manière, c’était le cas.
La gouvernante, n’entendant plus les bruits de pas derrière elle, se retourna de nouveau.
« - Il semblerait que le sortilège perde déjà de son effet. », dit-elle laconiquement.
Chad ne savait pas de quel sortilège elle parlait, mais il « savait » bien d’autres choses ! Comment les avait-il sues, il ne pouvait le dire. Mais elles n’en restaient pas moins vraies, ces choses nouvelles qu’il connaissant sans les avoir apprises ! Par exemple le fait que l’Empereur souffrait d’un mal qu’aucune médecine, qu’aucune concoction ne pouvait guérir. Le fait, aussi, que le nom de « Chad de Rive-Feuille » était bien connu de l’Empereur, et de l’Empire tout entier même.
Dame Mariella, prise de pitié peut-être, lui leva une partie du voile d’ombre qui planait sur les instants passés :
« - Personne, même pas le Grand Intendant, ne peut pénétrer les appartements privés de notre Souverain sans suivre des règles de sécurité précises. Dans votre cas, nos mages impériaux ont projeté sur les appartements de Sa Majesté un souffle d’apaisement de Cycléis. Seules les personnes bénies par Elle peuvent alors pénétrer les appartements sans effet notable. Les autres, comme vous et moi, bien que restant pleinement lucides sur place, perdent toute mémoire des instants passés dès lors qu’ils quittent les lieux. »
C’était donc cela ! Chad avait donc bien rencontré l’Empereur, en personne, mais ne s’en rappelait simplement plus !
« Mais alors », répondit-il, « pourquoi certains souvenirs me reviennent maintenant ?! »
« Ces souvenirs-là », répondit-elle, « sont ceux que Sa Majesté a décidé que vous vous rappelleriez. Sa puissance, sa magnificence, dépasse de loin les maigres pouvoirs de nos meilleurs mages. Il aurait pu, à tout moment, rompre le sort de nos mages, par un simple appel à Cycléis elle-même. »
Chad s’appuya sur un mur, près d’une des hautes fenêtres de l’étage. Il jeta son regard vers l’horizon infini. Ainsi donc, il ne se rappelait que ce dont l’Empereur souhaitait qu’il se rappelât. Par exemple le fait que lui, Chad, soit quelqu’un de connu de l’Empire. Et le fait que…
Le fait que la maladie de l’Empereur était d’ordre divin !
Reprenant de l’assurance, Chad se tourna vers la jeune femme. Il avait besoin d’exprimer à voix haute ses pensées, et elle était la seule à disposition pour l’entendre, devait-elle déjà savoir ou non ce qu’il avait à dire.
« L’Empereur n’est pas tombé malade. Ce sont les Dieux qui l’ont affaibli. L’Empire, les amranéens. Cycléis, le Nether. Les bannis, les punis. Tout n’est qu’équilibre ici-bas. Et voilà quatre mois, l’un de ces équilibres a été rompu… », lança-t-il d’un ton grave.
La gouvernante, sur le même ton, termina les pensées de l’Apothicaire :
« Et voilà quatre mois, le Guide Suprême des Amranéens nous a quitté, sans laisser personne à sa succession. »