Jour 1 :
La caravane est partie ce matin de Haut-Chêne et c'est comme une procession qui m'arrache à mon foyer. Les gardes qui nous escortent sont bourrus et silencieux. Un en particulier me fait froid dans le dos. Je n'ai pas réussi à soutenir son regard plus d'une seconde et son visage ravagé par de nombreuses cicatrices me glace le sang. Ce sont des hommes de Mont-Brumeux, façonnés par leur pays, par le froid. J'ai longuement pleuré, mais cela n’intéresse personne ici. Je n'ai pas envie de me mêler au groupe de voyageur.
Jour 2 :
Les paysages défilent. Les grandes plaines agricoles se transforment peu à peu. De ça et là des groupes d'arbres forment de jolies bosquets. Notre marche est soutenue. Certains des paysans de notre convoi devisent entre eux soit des prix des produits soit de la météo.
Jour 3 :
Aujourd'hui notre groupe s'est scindé en deux, la majorité s’arrêtant à Falaise-Plongeante. Il ne reste que deux gardes, dont l'homme-cicatrice, un vieux paysan borgne, sa nièce et son nourrisson. J'ai cru comprendre que la pauvre femme était fraichement veuve. Son oncle est un petit paysan de Haut-Chêne qui a bien de la peine à nourrir toute sa famille alors à la mort de son aide de ferme...
Jour 6 :
La monotonie a envahit notre quotidien. Le temps s'est rafraichit. Je suis usée. Nous arriverons demain à Mont-Brumeux. Vers midi, il a commencé à neigé. Je n'arrive plus à voir les vertes plaines de Haut-Chêne lorsque je ferme les yeux. Il n'y a que neige, marre gelée, sapins anciens. La nature semble hostile. Je n'ai pas l'impression d'être la bienvenue ...
Jour 7 : Arrivée à Mont-Brumeux
La ville de pierre ... C'est comme ça que je me la représente, l'Immense cité impériale... La vue des remparts me serre le cœur. Au passage de la herse c'est comme si une épaisse chape me tombait dessus. Tout me semble menaçant, démesuré ! L'homme-cicatrice me guide vers l'auberge de la ville. Ma tante que je n'ai jamais vu doit venir m'y retrouver.
Un feu dans la cheminée chauffe l'endroit. Je sens la chaleur s'infiltrer par tous les pores de ma peau mais mon esprit reste fermé. De la viande rôtie lentement dans l'âtre. Du jus suinte des plats que le tenancier apporte aux clients. Tout ceci me dégoute. Seule au milieu de ce capharnaüm j'ai envie de hurler...